"Il y a aujourd'hui une "internationale des générations" à laquelle appartiennent aussi nos petits-enfants. Ils sont nos voisins dans le temps. Si nous mettons aujourd'hui le feu à notre maison, le feu gagne l'avenir et, avec notre maison, tombent aussi en cendres celles pas encore construites de ceux qui ne sont pas encore nés. Nos ancêtres aussi appartiennent à cette internationale, car avec notre fin ils périront eux aussi, pour la seconde fois et, cette fois-ci, de façon définitive."
Günther Anders, La Menace nucléaire : considérations radicales sur l'âge atomique. 1972

samedi 16 juin 2012

Participation au meeting unitaire de La Réole le 14 juin

Bonsoir à tous,
Je remercie chaleureusement Martine Faure qui nous a tendu la main dès dimanche soir dernier, et qui permet ce soir aux écologistes de s'exprimer devant vous.
Je la remercie d'autant plus que cette attitude n'est pas si fréquente en politique, surtout en période électorale où les esprits ont parfois tendance à se crisper dans une rivalité qui, si elle peut s'avérer payante en résultats immédiats, obère souvent l'avenir.

Je n'avais au départ pas l'intention d'attaquer des personnes mais je dois dire qu'à la lecture de Sud Ouest mardi, mon sang n'a fait qu'un tour. Le candidat de l'UMP se réjouit de notre score, certes modeste, j'en conviens, en disant qu'il est une bonne nouvelle pour les agriculteurs. Autrement dit, les écologistes seraient les ennemis de l'agriculture et des agriculteurs.
Alors, soit M. d'Amécourt est mal informé sur la question, soit il est aveuglé par la mauvaise foi car, qui est responsable du malheur des agriculteurs aujourd'hui ?
Quand les paysans sont les premières victimes des produits chimiques qu'ils manipulent, quand les cancers de la vessie explosent chez les viticulteurs, quand les céréaliers sont victimes de stérilité en raison de l'usage des pesticides, quel est le modèle de développement qui provoque toutes ces maladies, sinon le modèle productiviste de l'agriculture intensive dont les néo-libéraux sont les farouches partisans ?

Pour expliquer en quoi tous les problèmes, économiques, sociaux et écologiques, sont liés, je voudrais prendre l'exemple du volailler Doux, qui entraîne aujourd'hui dans sa faillite 800 éleveurs.
Le groupe Doux a touché des milliards d'euros de subvention de l'Europe depuis 15 ans, dernièrement 56 millions en 2010, 35 millions en 2011, pour produire des poulets élevés en batterie, nourris aux Ogm et vendus congelés dans le monde entier et en inventant un système d'intégration, de l'élevage au plat cuisiné. Dans ce système intensif, l'éleveur n'est qu'un maillon d'une chaîne qui le dépasse : on lui fournit les poussins, les céréales pour les nourrir, il doit se contenter de contrôler au moyen d'ordinateurs la croissance accélérée de poulets qui n'auront de leur courte vie jamais vu un rayon de lumière naturelle ni un brin d'herbe. Dans ce système les éleveurs sont très mal rétribués : 0,197 € par kilo produit pour l'année 2010-2011. Les salariés des unités d'abattage ne sont pas mieux lotis, payés au Smic, sans rémunération de leur petite demi-heure de pause.
Doux exporte massivement au Moyen Orient et en Afrique. Dans ce continent les éleveurs locaux ne peuvent plus supporter la concurrence, cessent leurs activités, désertent les campagnes et affluent vers les mégalopoles où, chômeurs, ils vivent dans des bidonvilles. La nourriture de ces poulets de batterie est composée pour partie de maïs et pour partie de soja transgénique importé du Brésil qui pour les produire déforeste la forêt amazonienne pour le plus grand malheur des Indiens qui y vivent.
De la Bretagne à l'Amérique et à l'Afrique, c'est un système absurde qui s'est développé, au détriment des populations locales et des équilibres naturels. Alors, M. d'Amécourt, qui est l'ennemi des agriculteurs ?

Sur ces questions, je sais qu'il est possible d'unir nos efforts. N'est-ce pas sur proposition des écologistes que le Conseil Régional d'Aquitaine a doublé son effort financier pour soutenir l'agriculture biologique ?

Pour la première fois en France, un agriculteur charentais a gagné devant les tribunaux contre la firme Monsanto, faisant la démonstration que les troubles neurologiques dont il souffrait étaient causés par les produits qu'il manipulait. Alors, bien sûr, Monsanto n'en restera pas là, a fait appel, et on sait que la firme dispose de toute une armada de juristes qui travaillent à chercher la faille pour éviter une condamnation néfaste à ses intérêts économiques.
Mais les lignes commencent à bouger. Les paysans se rebellent et défendent leurs droits. Et ce combat est mondial. Les sociétés cotonnières du Burkina Faso viennent de décider d'arrêter la culture du coton Ogm car celui-ci n'a pas produit les résultats vantés. Un nombre important de paysans brésiliens viennent d'obtenir devant les tribunaux le remboursement des sommes qu'ils avaient versé à Monsanto pour l'achat de semences privatisées.
Car la politique de ces grandes firmes consiste, en posant des brevets sur les organismes vivants modifiés, à rendre les agriculteurs complètement dépendants en détruisant leurs savoir-faire ancestraux et en les ruinant économiquement.
Sur ces questions, je sais que nous pourrons unir nos efforts car lorsque nous nous sommes mobilisés en 2007 sur le canton de Cadillac pour dépister des plants de maïs Ogm, la députée Martine Faure a soutenu notre démarche. Je salue aussi la Région Aquitaine qui s'est déclarée territoire sans Ogm ainsi que la commune de Créon en 2009 sous l'impulsion de son maire Jean-Marie Darmian.

Nous autres écologistes sommes internationalistes, mais en plus de l'internationalisme du mouvement syndical et ouvrier, nous avons une vision planétaire.
Car la nature ne connaît ni la propriété privée ni les frontières, même la notion de frontière naturelle qui pourrait être matérialisée par des massifs montagneux n'a pas de sens, nos amis basques le savent bien.
Les apiculteurs espagnols ne peuvent plus vendre leur miel car leurs abeilles butinent indifféremment des plantes naturelles ou génétiquement modifiées. Tout comme les nuages radioactifs qui ne s'arrêtent pas aux frontières de la France parce que les hommes en auraient décidé ainsi et les conséquences mondiales malheureusement incalculables de Fukushima.
A ce sujet, j'espère que nous pourrons au cours de la législature remettre à plat et sans tabous la question nucléaire. Car il est nécessaire de revenir sur la prétendue indépendance énergétique de la France. Que serait l'industrie nucléaire française actuelle sans les mines d'uranium du Niger dont on sait dans quelles conditions écologiques et sociales Areva les exploite ? Et tout cela pour des retombées économiques actuellement nulles pour les populations locales qui vivent dans la plus extrême pauvreté.

Nous autres écologistes, pensons qu'il n'est pas possible de détacher le local du global. J'aime à citer le philosophe Günther Anders qui parlait d'une internationale des générations.
Il est irresponsable pour les hommes d'aujourd'hui, de faire des choix qui engagent l'avenir au point de rendre impossible toute décision libre des générations qui nous succèderont.
Lorsque nous produisons des déchets nucléaires qui nous survivront des milliers d'années, nous étendons notre pouvoir sur l'avenir et interdisons aux générations futures de faire d'autres choix que les nôtres.
Jean-Jacques Rousseau écrivait il y a plus de deux siècles qu'un peuple ne peut renoncer à sa liberté et que si par malheur il avait la folie de s'aliéner, cela le rendait doublement responsable : et devant ses propres enfants qu'il fait naître dans les chaînes, et devant l'humanité à venir à laquelle il transmettrait son aliénation. Je crois qu'aujourd'hui nous pouvons nous livrer à la même analyse concernant les choix techniques et les modèles de développement, et que nous avons le devoir de transmettre la planète dans un état qui permette aux générations futures d'exercer librement leurs propres choix de développement.
Je peux vous sembler bien loin du contexte politique présent mais pas du tout. La politique que nous mettrons en oeuvre ensemble à l'assemblée et au gouvernement pour les cinq années à venir doit être pensée à partir de ces préoccupations. Les périodes de crise devraient être propices à la transformation en profondeur de nos schémas de pensées, de nos modèles de production et de consommation.
Avons-nous encore le choix ? Pouvons-nous prendre aujourd'hui, démocratiquement, des décisions qui nous permettront de sortir de la crise et de réinventer un système plus humain ou attendrons-nous encore jusqu'à ce que le réchauffement climatique conduise à de tels mouvements de populations et de guerres autour des ressources qu'il ne nous restera plus que les décisions autoritaires dont rêvent certains ?
Dans quelques jours va débuter le sommet Rio+20 où vont être discutées au niveau mondial les solutions au réchauffement climatique, à la préservation des ressources naturelles, à la déforestation, à la protection des biens communs, gageons que nous saurons mettre en oeuvre des solutions politiques fortes pour la décennie à venir.
Je me réjouis que ces derniers jours des signaux aient été lancés, quand la ministre de l'écologie Nicole Bricq publie la carte des forages de gaz de schistes qui nous concernent localement, pas très loin d'ici en Dordogne, quand elle décide de suspendre les permis de forages d'hydrocarbures de la compagnie Shell au large de la Guyane afin de veiller à la préservation des fonds marins.

Pour en revenir à notre 12e circonscription, nous pouvons d'ores et déjà mettre en oeuvre ensemble des solutions locales, en élaborant des plans de développement du territoire qui soient vraiment au service des populations et qui préservent son patrimoine naturel. Nous, écologistes, serons toujours disponibles pour travailler avec vous dans ce sens.
Pour terminer je voudrai remercier encore une fois Martine Faure de nous associer à sa victoire de dimanche prochain qui, j'en suis convaincue, sera large et brillante. Cette victoire est d'autant plus nécessaire qu'on a bien vu que, Sarkozy battu, rien n'a changé à droite. Au cours de cette campagne des législatives, les derniers masques sont tombés, les prises de position de l'UMP ont montré que son idéologie est profondément grangrenée par les idées de l'extrême droite.
Le combat ne fait que commencer pour construire ensemble une République des droits vraiment universels, une République solidaire, écologique et sociale.
DJ





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